18 mars 2007

Moi, je fais des choix!

Saviez-vous que tout le monde (ça vous inclut!) fait des milliers de choix chaque jour?

Des petits détails qu’on ne croit même pas être des choix, aux plus évidents pour lesquels on pèse le pour et le contre pendant plusieurs minutes.

Je me suis arrêté sur cette idée pour une journée (dimanche).

Voici quelques-uns de mes choix dominicaux :
  • Face à mon réveil qui m’indique qu’il n’est que 7 h 55 : rester au chaud sous la couette ou débuter ma journée. Si je n’avais pas été seule sous la couette, mon choix aurait été beaucoup plus facile! Peu importe, je décide tout de même de rester un peu plus longtemps collée sur l’oreiller.
  • Une fois sous la douche, je peux choisir de mousser la peau avec un gel douche à la banane, à la coconut, à la figue, à la fraise ou à la mangue (pour ne nommer que ceux-là!). J’opte pour la fraise!
  • Une fois propre et sèche, je peux choisir de m’hydrater la peau avec un beurre corporel à la pomme, à la vanille, au bleuet, au pépins de raisins ou au coconut (pour ne nommer que ceux-là!). J’opte pour la vanille! C’est un bon complément à la fraise.
  • Quelle musique me mettre dans les oreilles pendant l’opération? Lenny Kravitz –Greatest Hits, rien de moins!
  • Choix suivant : café ou jus d’orange. Je choisis… les deux! Et je commence par le café, ce qui me met du pep dans le capot. Encore plus que Lenny!
  • Couleur sur mes paupières? Rose!
  • Design des bobettes? Faces de singes!
  • Chandail? Jaune!
  • Rouge à lèvres? Non! (facile, j’en met jamais!!)
  • Cheveux? Queue de cheval!

Voilà déjà plusieurs choix… et il n’est que 10 h du mat!!
Bon le café m’a aidé à accélérer la plupart de mes choix, mais tout de même.

Voici ma conclusion :
Si je fais tant de choix tout au long de ma journée, chaque jour, je dois être en mesure d’en prendre au moins un qui me rendra plus heureuse et plus légère!

J’ai passé le reste de la journée à peindre des petits bouts de mon appart en blanc pour pouvoir choisir des couleurs qui me ressemble pour le colorer et le décorer. Mais au lieu de penser au choix de couleurs pouvant me plaire, j’avais le cerveau embrumé par un tout autre type de choix.
Un autre Guide des Vacances au Québec se prépare et mon boulot devient de plus en plus ardu et de longues semaines se pointent à l’horizon.

Non, ne vous inquiétez pas, je n’ai pas passé mon dimanche à penser au dur labeur à venir… mais plutôt à un moyen d’en sortir saine d’esprit.

Je tiens ici à parler de Bob-le-grand-sage, qui m’a un jour conseillé de prendre exemple sur Saint-Jacques et de me trouver un Compostelle avant de virer folle. Voilà donc mon plus grand choix de la journée (pour ne pas dire du mois!) : à la sortie du guide, après le rush, je quitte Montréal, je pars à l’aventure, j’irai me remplir les yeux et la tête des beautés du monde. En d’autres mots : je criss mon camp!!

Ne sortez pas vos mouchoirs tout de suite, je ne partirai pas pour toujours. J’irai me balader au loin pour une semaine ou deux, peut-être un peu plus.
J’irai me faire du bien, toute seule, loin de tous ceux qui connaissent mon nom.
J’irai sourire à des inconnus.
J’irai gravir des montagnes dont j’ignore le nom.
J’irai me commander un café dans une langue étrange.
Je vous enverrai des cartes postales dont vous ne reconnaîtrez peut-être pas l’image…

Ça vous dit?
Moi ça me dit!!

Voilà donc, c’est décidé! Je partirai!
Ça me fera du bien.
Ça me rendra un peu de légèreté ça!
Dieu sait que j’ai besoin de légèreté…

Mais il me reste un autre grand choix.
Un choix chouette… mais un très grand choix.

OÙ?

Où devrais-je partir me faire du bien? Où et à faire quoi?

Du sable entre les orteils, lunettes fumées au nez et vent du large dans les cheveux?
Un sentier de GR sous les semelles, sac au dos et crampes aux mollets?
Une grande ville à mes pieds, pleine de musées, de bars, de restos et de beaux gars?
Dans un 4X4 au milieu de kilomètres de désert?
Des milliers d’années racontées par les ruines qui m’entourent?
Dans un autocar climatisé à apprendre les us et coutumes de gens qui ne parlent aucune des langues que je connais?
Sur un grand navire?

J’en sais rien!
C’est mon problème pour le moment… trop de choix, c’est comme aucun.
Tout m’intéresse!

Je fais donc un appel à tous. Moi, j’ai fais le choix de partir…
Vous pouvez m’aider à trouver où???

13 mars 2007

Et moi je suis quoi?

Moi je suis quoi?

Face à tous ces gens qui m’entourent, je me demande…
Face à tous ceux qui m’abandonnent, d’une façon ou d’une autre, et donc sans eux, moi je suis quoi?
Face à tous ces amoureux.
Face à toutes ces filles et mères heureuses ensemble.
Face à tous ces gens souriants, insouciants.
Moi.
Moi je suis quoi?

Je suis une fille qui sourie aussi des fois.
On me dit que je suis belle. Des fois. Mais ce n’est pas assez.
On me dit que je suis drôle. Des fois. Mais ce n’est pas assez.
On me dit qu’on apprécie ma compagnie, qu’on me trouve intéressante et même divertissante parfois.
J’entends ces choses à l’occasion.
Mais ce n’est jamais assez pour les gens qui le disent. Je ne saurais même pas dire pourquoi ils le disent d’ailleurs.

Et puis, j’entends une voix qui rit au bout du fil quand je fais une blague.
Ça me fait du bien ça.
Ça me fait sourire. Première fois aujourd’hui que je souris. C’est trop peu une fois par jour. C’est trop tard 17 h 00 pour sourire.
Cette voix à qui je propose de faire un truc et qui me parle de week-ends lointains, elle me fait du bien. Une voix à qui je n’ose pas avouer que, bizarrement, sans savoir pourquoi, c’est elle que j’aurais envie d’entendre me dire « tu veux qu’on se voit ce soir? ». Sans avoir réfléchi, c’est cette voix que j’ai appelée. Mais cette voix, elle ne le savait pas.
Son propriétaire est très occupé et je n’ai pas osé lui demandé clairement à le voir avant dans un mois.
Et moi je suis quoi?
Pourquoi ne suis-je pas occupée, moi, tous les week-ends jusqu’à la fin du mois d’avril?
Pourquoi je ne peux pas sauter cette étape de tristesse?
Double tristesse, triple et peut-être plus, même.
Alors que le printemps est synonyme de renouveau, de renaissance, d’accouplement, de joie et de beau temps pour la plupart des êtres vivants normaux, moi… je m’enlise et je suis triste.

Je vous explique brièvement.
J’irai en ordre chronologique si vous me permettez.

Première tristesse :
Il y a des mois que j’ai coupé les ponts avec mon père et ma sœur. Seule famille qu’il me reste. C’était la fête de ma sœur le 8 mars et je l’ai appelée. Je l’ai vue, même. Ça m’a fait du bien. Mais j’ai peur d’être faible à nouveau et de ne pas arriver à faire ce contact à nouveau.
J’ai peur parce que je ne sais pas quoi faire maintenant et que j’ai peur de tout perdre encore.

Deuxième tristesse :
Plaie béante au cœur. Un homme en qui j’avais confiance m’a blessée.
Encore.
Il a fini par m’amadouer après une longue période de doute et d’apprivoisement. Peut-être me suis-je seulement convaincue à devenir amadouée et apprivoisée, j’en sais rien. Bref, cet homme, vieil enfant peureux et beaucoup trop vieux à la fois, a pris fuite.
Encore.
Je me sens blessée. Je me sens trahie. On m’a menti.
Encore.
Mais, malgré tout, je ne peux pas me résoudre à le détester.
Je pense que c’est plus ça qui me rend triste.
Que ce n’aie pas été moi qui lui aie fait mal cette fois. Que je ne sois même pas arrivée à le toucher assez pour le blesser, juste un peu, à mon tour.
Et je sais que le creux de la vague est encore à venir.
Toutes les activités planifiées à l’avance.
Tous les rendez-vous lointains inscrits au calendrier ou à l’agenda.
Comment les ignorer? Comment ne pas les laisser m’atteindre. Qui trouver en guise de remplacement qui saura accepter mon air vaguement et inexplicablement triste?

Troisième tristesse :
Dans 7 jours, ç’aurait été l’anniversaire de ma toute petite maman. La grande Jeanne d’Arc. La plus grande de toutes.
Le 20 mars.
54 ans, qu’elle aurait eu.
C’est si jeune 54 ans.
Elle me manque.
Souvent, le soir, j’aurais envie d’appeler quelqu’un, juste pour jaser, juste pour raconter ma journée et les millions d’idées qui se bousculent comme des bulles de champagne dans mon cerveau et c’est sur son nom et numéro (que j’ai jamais eu le courage d’effacer) que je m’arrête chaque fois alors que je passe les noms un par un dans le répertoire de mon cellulaire.
Son nom qui n’existe plus au fond.
Son numéro qui a été donné à quelqu’un d’autre qui ne me connaît pas.
54 ans, qu’elle aurait eu. J’ai la moitié de ça moi maintenant.
J’aimerais entendre ses conseils sages.
J’aimerais l’entendre m’appeler « ma poule » encore et toujours.
J’aimerais qu’elle me flatte la tempe pour arrêter mes pleurs.
J’aimerais me coucher près d’elle et la regarder dormir doucement, tant si tellement doucement, comme si la maladie et la douleur n’existaient pas, n’avaient jamais existées et que le sommeil et la tranquillité d’esprit prenaient toute la place. J’aimerais croire que mon amour seul aurait pu la sauver. J’aimerais croire que…
Elle me manque.
C’est tout.
Une seule personne vous manque et la terre semble dépeuplée. Je n’arrive pas à retrouver de qui est cette citation, mais elle me parait appropriée.

Quatrième tristesse :
Le 27 mars prochain c’est la date à laquelle je suis partie pour la France il y aura 2 ans déjà.
Un coup de tête. Tout s’est décidé en moins d’un mois, j’ai tout laissé derrière et je suis partie…
C’est le meilleur sentiment qu’un tout petit être humain misérable puisse vivre dans toute sa trop courte existence, croyez-moi!
Grand événement.
Grande tristesse.
Pourquoi suis-je à Montréal en ce moment, on peut me le dire?

Cinquième tristesse :
Bientôt, le 5 avril exactement, ce sera mon tour de fêter ma naissance.
J’angoisse atrocement à l’idée de cette date.
En 2005, j’étais seule à l’autre bout du monde pour ma fête. Tellement heureuse, tellement légère. Je buvais une bière Place des Terreaux en charmante compagnie.
En 2006, j’étais seule dans mon appart minable de Montréal pour ma fête. J’ai passé la soirée à réparer ma douche qui mouillait la pièce entière, mais pas mes cheveux le matin même. Tout ce que je buvais c’est mes larmes.
Cette année, je ne sais pas quoi faire, ni attendre. J’ai envie de préparer un truc, d’inviter plein de gens, toutes les personnes que je voudrais me voir sourire. Mais qui, au fait? Qui?
Je dois faire quoi?
M’entourer de plein de monde pour oublier qu’au fond je suis toute seule ou alors rester toute seule en pleurant dans mon salon pour essayer de l’accepter?

Sixième tristesse :
Plus j’y pense, chaque fois que j’y pense, je vois que le seul petit instant de bonheur véritable de ma vie fut quand je l’ai fui, cette vie. Quand j’étais à Lyon. Toute seule. Sans passé, sans futur.
C’est pas pour rien que tous les monde rêve d’être des espions, agents secrets et autres James Bond du genre… pour l’avoir vécu, je peux vous confirmer que c’est particulièrement chouette d’être personne du tout!
Aucun compte à rendre.
Aucune explication à donner sur nos actions.
Aucun remord sur les choix faits.
Chaque nouvelle ville à ses pieds, le monde à conquérir, personne à attendre, personne à aller rejoindre.
Le sentiment de sentir que Moi c’est le monde entier… wow! C’est inexplicable. Et pour quiconque ne l’ayant pas vécu, c’est totalement incompréhensible. Même s’ils hochent de la tête en souriant à l’écoute de mes récits, ils n’y connaissent rien.
Ça, ça me manque.
La belle Em peut me comprendre, elle. Elle avec qui j’ai partagé un appartement lyonnais pendant plusieurs mois. Elle avec qui je fumais le narguilé bien calée dans notre sofa très peu confortable. Elle à qui je racontais ma vie. Elle qui fut la première personne que j’ai été voir le matin où la mort arriva dans ma vie. La belle Em. Ma belle Em…

Dernière tristesse :
Ma faiblesse.
Ma tant, si tellement, grande faiblesse.
Face à tous les hommes de ma vie :
· Mon beau grand brun que je ne pourrai jamais, malgré tout, ne pas aimer.
· Mon beau Coco que j’aimerai plus que tout pour toute la vie.
· Mon beau Pirlouie, que j’aimerais bien pouvoir aimer un peu, sans arrière pensée.
Et tous les autres qui monopolisent tous les petits coins pointus de mon cœur :
· MON Jipi que je vois trop peu souvent mais qui me comprends tellement bien;
· Jo-de-Taxi avec ta musique, tes blagues et toutes les fois où tu me fais sourire;
· Flip pour ton support de début d’année qui mérite un oscar (vraiment) et pour ta chouette compagnie toujours pleine de compliments gentils;
· Bob en me poussant à me trouver et m’imposer des Compostelles pour ne pas devenir folle;
· Jean-Max que je vois trop peu souvent… peut-être ton déménagement à Québec et ton bébé à venir sera une raison pour se voir!;
· Eric-le-pétard, qui me lance tellement d’invitations démentes comme des rendez-vous en Guadeloupe devant lesquelles j’hésite toujours un peu avant de dire non;
· François, malgré ce que tu crois, je te trouve chouette;
· Danny, du haut de ton nord, tu me fais rire chaque fois qu'on se parle, nos soirées au karaoke me manquent;
· et tous les autres que je nomme pas, faut de temps (Gilligan, Air-Guitar Louka, Docteur Gadget, etc., etc., etc.)
Ma faiblesse encore plus grande face aux femmes qui m’entourent et que je suis incapable d’approcher vraiment pour plus de quelques minutes (exception faite de Lyne, habitude et travail oblige…).


Voilà.
C’est la fin de mes tristesses.
Et moi je suis quoi face à ça?
Moi, je fais quoi avec tout ça?
Je fais quoi face à tout ça?
Vous pouvez me dire?

06 mars 2007

Moi et le bel homme

Petit matin de mars sur l’île de Montréal.
On est mardi et il est 8 h 20 coin Jarry et Chambord.
Il fait moins trois cent soixante-quinze degrés.
Environ.

Je suis bien habillée, je n’ai pas trop froid, ça va.
C’est même presque drôle, j’ai les poils de nez qui collent ensemble quand j’inspire.
Je décide tout de même, question de ne pas mourir sur le coin de rue en attendant mon 2e bus, de me rendre au boulot en métro.
Le souci, c’est que le bus allant direction métro n’est pas en vue.
Bah, pas grave, je vais marcher, ça va me garder au chaud.
Une fois devant le métro (juste comme le bus arrive) j’ai les doigts qui paniquent. Mes jolis gants de cuirs sont... jolis. C’est tout.
Je suis pas déçue d’arriver.

Je suis chanceuse, une fois sur le quai, le train est déjà là et j’y entre juste à temps pour ne pas me faire coincer les cheveux entre les portes.

Y a un peu pas mal de monde. Je suis debout, coincée dans un trou, à tenir le poteau à bout de bras, face à face avec un homme, lui aussi coincé dans son trou.

Je lui lance un sourire gentil qui ne laisse voir qu’une de mes fossettes pour lui laisser savoir que je suis vraiment désolée de lui étirer mon bras dans la face. Il me sourit vitement en retour, pour me laisser savoir qu’il préfère mon bras dans sa face à mon corps entier propulsé sur lui au prochain arrêt pour cause de freinage trop brusque.
Au moins les choses sont claires.
Pas de rancune.
Bien.

Sauf que je vois bien du coin de l’œil qu’il me regarde, qu’il regarde par terre, qu’il me regarde encore, etc.
Je commence à être un peu mal à l’aise.
Surtout qu’il est vraiment juste dans ma face.
Surtout que j’ai pas mon iPod pour me chanter des trucs qui me propulseraient à 1 000 lieux d’ici.
Surtout que, après avoir jeté un 2e coup d’œil (puis un 3e pour être certaine), je me rends compte qu’il est vraiment beau. Le genre de gars à côté de qui on voudrait s’asseoir par hasard au bar quand on sort prendre un verre « remonte-moral » après s’être fait jeter. Le genre de gars qui ferait rougir bien des filles à juste les ignorer. Le genre de gars qui pourrait faire des annonces de bobettes JM en affiches géantes sur le bord de l’autoroute 20, direction Centre-Ville. Le genre de gars qui me fuit depuis toujours...
Mais là il me regarde quand il croit que je vois rien et, surtout, surtout, il ne se sauve pas.

Bizarre.
Étrange, même.

Merde!
Juste au milieu de ma réflexion, je me rends compte que je souffre tout à coup du syndrome de la goutte au nez. Je sniffe un coup ou deux, ça change rien.
(Il a entendu, c’est sûr!)
J’enlève tant bien que mal mes gants en essayant de ne pas perdre l’équilibre.
(Il me regarde faire attentivement, prêt à m’attraper si je tombe)
Je cherche dans mon sac à main grand comme ma main pour un paquet de mouchoir.
(Il me voit faire)
Je m’essuie rapidement la goutte qui menace de faire le grand saut du revers de la main.
(Il a vu, c’est sûr!!)
Je continue de cherche comme si j’étais Mary Poppins et que j’en sortirais une boîte neuve de Scotties triple épaisseur.
(Il… Il… quoi???? ** ok, ça suffit les parenthèses, là! **

Je disais donc :
Il me tend un mouchoir en souriant. Incroyable!
Je ne sais pas trop si je dois être flattée du geste gentleman ou si je dois me sentir mal à l’aise d’en être arrivée à ce qu’un étranger m’offre un mouchoir pour cause de goutte au nez flagrante.
J’opte pour la première option, les gentlemen étant de plus en plus rare en ce bas monde et aussi un peu parce qu’il a l’air charmant, qu’il me sourit à nouveau et qu’il semble (je rêve peut-être) rougir à ma place.

Je lui souris pour dire merci.
Je me mouche aussi gracieusement et discrètement que faire se peut, c’est-à-dire très peu.
Je lui dis merci avec des mots cette fois, en rangeant le mouchoir à demi-usé dans ma poche, on ne sait jamais, ça peut servir.

Et là, comme si ce qui venait de se passer n’était pas assez incroyable, il me parle.
Je ne pourrais dire les mots exacts utilisés, mais c’était du small talk à la « c’est pas drôle l’hiver! ». Du n’importe quoi pour ouvrir une conversation quoi.
Tout ce que je trouve c’est un « ouais! » lancé en riant à moitié et de me dépêcher à regarder de l’autre côté.
Il va comprendre que je ne suis pas à l’aise du tout et il va abandonner.
Pourtant...
Pourquoi je suis mal à l’aise?
Pourquoi je voudrais qu’il abandonne?
Toute ma vie j’ai voulu que les beaux mecs portent attention à moi. Toute ma vie j’ai couru après les beaux mecs. Et toute ma vie ils ont couru pour s’éloigner.
Et là, lui, il me parle.

Il fait du bien à l’ego et à l’œil, laissez-moi vous le dire. Un peu plus grand que moi. Cheveux et teint foncés, petite barbe bien taillée qui a l’air toute douce, des yeux profonds et rieurs...

Mais non. Pour une raison obscure, j’aurais juste envie qu’il descende au prochain arrêt.

Mais non. Il ne descend pas.

On reste dans cette situation de malaise tout de même pas trop déplaisant jusqu’à ce qu’on arrive à la station Berri où, enfin, je peux me retourner et descendre. Juste avant, je lui redonne un dernier sourire qui lui dit de passer une belle journée et merci encore pour le mouchoir. Il fait de même. Sans la portion de remerciement pour le mouchoir.

De toute la longueur de mes longues pattes, je marche rapidement jusqu’à l’autre quai, direction travail. Je me secoue la tête et les idées. Je me dis que c’était chouette ce petit épisode matinal. J’y pense presque plus en fait quand j’arrive au bas de l’escalier et qu’on me tape doucement sur l’épaule, comme pour m’avertir que j’ai échappé un truc.
Je me retourne.
C’est mon Monsieur Mouchoir.
Il me sourit et me dit tout plein de trucs, timidement en regardant tantôt vers ses pieds, tantôt en plein au fond de mes yeux. Je suis tellement surprise que je n’assimile que quelques-unes de ses paroles, mais il me dit plein de choses : « pas mon genre », « jamais fait ça », « je te donne ma carte », « charmante », « peux appeler si tu veux », « prendre un verre »
EUH...
QUOI?!?!?!?!
Ai-je bien compris qu’il m’a traité de... charmante?

Je suis tellement abasourdie, que je ne réponds absolument rien. J’ai une carte d’affaires entre les doigts, je le regarde, je crois que j’ai la bouche un peu ouverte et je ne dis rien.
Il reste là quelques secondes de plus.
Puis il doit se sentir tellement idiot qu’il finit par me souhaite une belle journée et se tourne pour repartir vers le haut des escaliers.
Et moi je ne bouge pas, j’ai toujours la bouche un peu ouverte, je le regarde partir et tout ce que je trouve à faire c’est de lui demi-crier (parce qu’il est tout de même rendu au milieu des escaliers maintenant) « merci pour le mouchoir! »
Je me retourne vers le métro qui arrive.
Je fais une grimace.
Je me trouve twit.

Une fois assise dans le métro, 3 stations plus loin, je baisse les yeux sur la carte que j’ai toujours en main. Charles quelque chose, c’est son nom.
Et là, ça me frappe.
Je comprends tout.
Je venais de comprendre le problème de Charles, ce qui faisait que j’avais somme toute pas vraiment envie qu’il s’aventure à me parler.
Il s’appelait Charles.
Il s’appelait Charles et il n’était pas le beau grand brun qui me donne des frissons à flatter mon ventre en me parlant doucement à l’oreille quand j’angoisse pour rien.
Il n’était pas lui.
Bien sûr qu’il était beau, mais il n’était pas lui.

À cet instant précis, j’ai souri. J’ai souri avec les dents, toute seule dans le métro, pour 3 stations de plus. J’ai souri et une fois hors du wagon, j’ai déchiré la carte en deux et j’ai souri encore plus en la lançant gracieusement dans la poubelle en faisant virevolter mes cheveux au ralenti par-dessus mon épaule comme dans une annonce de shampooing (j’entendais presque la musique à la Lenny Kravitz retentir autour de moi). J’en ai profité pour jeter le mouchoir à demi-utilisé aussi et je suis partie toute légère vers le bureau.

Voilà donc.
J’étais légère.
J’avais compris et j’étais légère.
Même le plus beau des Charles n’est pas à la hauteur.
C’est pas peu dire!